samedi 5 mars 2011

L'Union africaine aux abonnés absents

Alors que le spectre de la guerre civile exige une réaction rapide, l'Union africaine chargée de trouver une solution à la crise politique s'accorde le luxe du temps de la réflexion. Abobo, le 3 mars 2011
IIl faudra bien prendre son mal en patience. La résolution que l'on était en droit d'attendre du panel des chefs d'Etat sur la Côte d'Ivoire est renvoyée à plus tard. Le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine (UA) vient d'accorder un délai de grâce d'un mois à ce groupe de haut niveau. Ce qu'il n'a pas fait en un mois, le panel le réussira-t-il au bout de ce nouveau terme ? Raisonnablement, on peut en douter. Qu'est-ce qui prouve que ce panel, qui a publiquement exposé des dissensions en son sein, sera capable de faire violence sur lui-même pour prendre des "décisions contraignantes" contre un des deux protagonistes de la crise ivoirienne ? 

Le président Compaoré, voué aux gémonies par les partisans de Gbagbo, parce que gardien de la position de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) qui préconise une intervention militaire comme solution ultime pour faire respecter le verdict des urnes, cèdera difficilement du terrain au sein du panel. Jacob Zuma, séduit par le discours nationaliste de Gbagbo et ses affidés, ne souhaite pas une intervention "impérialiste" en Côte d'Ivoire. Il faut espérer que son séjour en France lui permette de mieux comprendre le choix fait par Nicolas Sarkozy. Le président français, on le sait, s'est aligné sur la position de la communauté internationale qui reconnaît Alassane Ouattara comme président élu. 

Ces deux positions diamétralement opposées peuvent-elles accoucher d'un modus vivendi, d'un compromis bénéfique à la Côte d'Ivoire ? Les Ivoiriens, eux, désespèrent de cette Union africaine dont la médiation a été qualifiée de "dernière chance". Pris entre deux feux (celui du commando invisible et celui des Forces de Défense et de Sécurité loyales à Gbagbo traquant les rebelles), ils continuent de mourir sous les balles assassines de la machine de guerre des deux camps qui se préparent inéluctablement à l'affrontement. Le martyre du peuple ivoirien ne semble pas émouvoir outre mesure l'Union africaine. Elle se donne du temps alors que toutes les conditions d'une guerre civile sont en train de se mettre en place. 

Cette prolongation du délai de la remise de la copie du panel a plutôt des allures d'une fuite de responsabilité, une sorte de politique de l'autruche qui va entamer le peu de crédit que les Africains accordaient encore à cette organisation. Il ne s'agit pas ici de protéger x ou y. Il s'agit plus sérieusement de faire respecter une décision internationalement admise et de prendre des mesures pour que le pays ne plonge pas dans l'anarchie totale pour le bien des Ivoiriens et des pays de la sous-région. 

Dans un mois, ces "décisions contraignantes" annoncées à cor et à cri comme le clou de la médiation du panel ne seront peut-être d'aucune utilité. La situation devient incontrôlable de jour en jour. Et il n'est pas exclu que le rapport de force sur le terrain bascule en faveur de l'un ou de l'autre camp. C'est peut-être ce qu'espère l'UA pour ne pas avoir à trancher dans le vif. Ce serait alors de sa part, une regrettable preuve de poltronnerie.

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