mardi 26 avril 2011

Côte d'Ivoire: Pourquoi l’eau arrive au compte goutte

Pénurie d’eau potable - 8ème tranche, sous-quartier résidentiel d’Angré. Il est 8h ce dimanche de Pâques. Un calme plat mais trompeur règne sur la grande artère. En effet, au niveau de l’entrée principale de la cité Soleil 3, quatre femmes et deux jeunes hommes, cuvettes et bidons en main, se suivent en file indienne. Les jours se suivent et se ressemblent pour ces populations déjà habituées à aller chaque jour un peu plus loin pour obtenir de l’eau potable. «Depuis le déclenchement de cette crise, nous n’arrivons plus à nous approvisionner en eau potable. Au début, l’eau venait au compte-gouttes mais maintenant que les choses semblent s’améliorer, il n’y a plus d’eau. On ne comprend plus rien», s’alarme Mme Gnabro Madeleine, chef du convoi. Les habitants de la commune de Yopougon n’ont pas été épargnés.

Depuis le dimanche 17 avril, l’eau n’a pas coulé dans les robinets, témoigne K. Martine résidant dans le quartier de Port-Bouët II. Les personnes résidant dans des immeubles ont beaucoup souffert de ces coupures. «On partait chercher de l’eau chez nos voisins qui habitent dans des maisons basses. Ils avaient la chance d’avoir de l’eau par moments», précise-t-elle. Comme dans les villages reculés qui n’ont pas d’adduction d’eau, on croisait dans les rues des femmes portant des bassines ou des bidons sur la tête. «Fort heureusement, l’eau a été rétablie le mercredi 20 avril», raconte-t-elle satisfaite. Mais ce n’est pas encore le cas dans tous les quartiers d’Abidjan. Après plus de quatre mois de coupure brève et de distribution rationnelle de l’eau, la reprise totale de l’alimentation des ménages en eau potable tarde toujours. Comment se ravitaillent les populations en eau potable en attendant la réhabilitation des usines de traitement de la Sodeci? Quel est l’Etat des lieux des dégâts occasionnés par les combats à l’arme lourde sur les infrastructures de la Société de distribution d’eau de Côte d’Ivoire (Sodeci)?

II Plateaux, Angré, Riviera... nul n’est épargné.

Vigilance et rapidité sont les maîtres mots des ménages des II Plateaux et Angré. En effet, la Sodeci a, semble-t-il, décidé pour la reprise de procéder par une distribution rationnelle de l’eau dans plusieurs quartiers d’Abidjan. Ainsi, la bonne vieille technique des ménages qui consiste à prendre son mal en patience en espérant voir l’eau couler dans les robinets vers 2h voire 3h du matin est désormais inefficace. Selon Mme Kouassi qui réside à la 7è tranche, il faut rester en alerte toutes les heures de crainte de ne pas avoir de l’eau. «Personne ne dort encore. Chaque famille tente de mettre en place un système de veille pour ne pas manquer le tour de ravitaillement du quartier. C’est un peu plus compliqué maintenant par rapport aux coupures d’avant la crise. A cette période, on savait plus ou moins l’heure à laquelle l’eau allait revenir surtout que la Sodeci informait la clientèle sur les coupures. Maintenant, on ignore tout et pire quand il y a de l’eau, il peut arriver que c’est seulement à la pompe installée au garage qu’on ait de l’eau. D’autres fois, c’est au robinet de la cuisine qu’on peut en avoir. C’est pourquoi, toutes les 30 mn environ, j’envoie ma servante faire le tour des robinets de la maison afin de s’assurer que l’eau ne vienne quelque part dans la maison à notre insu», affirme cette habitante des II plateaux–7ème tranche. Mlle Marie Chantal, cadre dans une banque de la place, vit un tout autre calvaire. «Je vis au troisième étage d’un immeuble à la Riviera. Depuis que la crise a commencé je ne reçois plus d’eau. Le débit est tellement faible que quand l’eau revient c’est seulement ma voisine du premier qui peut en avoir. C’est donc chez elle que j’arrive à m’approvisionner en eau potable. Mais je ne me plains pas trop car il y a des quartiers qui n’ont pas d’eau potable depuis 10 jours», soutient- elle.

En attendant la réhabilitation des usines de traitement

Canalisations endommagées, circuits d’alimentation détruits, usine de traitement saccagée. Le préjudice subit par la Sodeci suite aux violents combats à Abidjan est énorme. Le cas de la commune de Yopougon est encore plus alarmant. Les équipes techniques de la Sodeci ne peuvent pas s’y rendre à cause des affrontements entre miliciens et Forces républicaines. L’urgence, selon un agent de la compagnie, est de réparer au plus vite les dégâts à l’usine de la 8ème tranche et d’Adjamé-Macaci afin de mettre fin aux coupures brèves et au système de distribution rationnelle qui est en cours dans les quartiers. En effet, le centre logistique de la Sodeci, situé dans la commune d'Adjamé, a été saccagé pendant lors des violences post électorales. Selon Tondossama Broulaye, Directeur régional de la Sodeci pour l’Ouest, il n'y a plus un seul ordinateur dans ce centre. Outre ces difficultés, les flambées de violence post électorales ont interrompu l'approvisionnement en substances chimiques employées dans les stations de traitement des eaux du pays. La Sodeci, avec l’appui de la Croix-Rouge, est à pied d’œuvre pour résoudre ce problème. Mais, en attendant la fin de ces travaux, les populations continuent de battre le pavé en quête d’eau potable.

Fofana Ali 

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